Le « robot-courtier », une innovation pérenne ?

 

Destiné pour le moment aux professionnels (petites entreprises de 0 à 5 salariés et travailleurs indépendants), le robot-courtier développé par la start-up +Simple propose à ses clients un parcours digitalisé simplifié pour souscrire les assurances nécessaires à leur activité professionnelle.
Ce « robot », conçu pour apprendre de chaque levée de fonds, doit à terme améliorer considérablement le parcours client et faire gagner du temps aux courtiers humains. Alors, est-ce une véritable révolution du monde du courtage qui s’annonce ?

Le courtage s’inscrit dans la marche à la digitalisation

52% des tâches réalisées actuellement sur le lieu de travail seront effectuées par des robots d’ici 2025, contre 29% aujourd’hui : tels sont les résultats présentés par une étude au forum économique de Davos. C’est forte de ce constat que la plateforme de souscription en ligne +Simple a développé en 2015 et mis en ligne en 2016 son « Robot-Courtier », destinée à économiser le temps de ses courtiers dépensé sur l’administratif pour leur permettre de se concentrer sur les tâches à forte valeur ajoutée.

Pourquoi un robot-courtier ?

«Quand on est un professionnel indépendant et que l'on veut couvrir l'ensemble de ses besoins en assurance, on croule sous les documents et les formulaires à remplir. » C’est cette difficulté que plusieurs de ses commerçants lui ont rapporté rencontrer qui a achevé de motiver Éric Mignot, le président et cofondateur de +Simple.
De la responsabilité civile et professionnelle à l’assurance des locaux, du véhicule, à la protection juridique, à la complémentaire santé collective et à la prévoyance, les démarches pour souscrire à toutes les assurances nécessaires à une activité professionnelle représentent un poids considérables pour les petites entreprises. « C'est environ 260 questions à remplir, 5 à 10 polices d'assurance à souscrire et quelque 1000 pages de documentation papier. Les contrats s'empilent les uns sur les autres », résume Éric Mignot.
Le but final du robot-courtier est de mettre un terme à ce casse-tête administratif, et de simplifier l’expérience humaine. Il fait en amont, grâce à ses algorithmes, tout ce travail de sélection laborieux, qu’on peut aisément admettre comme automatisable sans perte pour l’utilisateur.

Comment fonctionne le robot-courtier ?

Laissons sur ce point la parole à son créateur :
« Notre robot-courtier permet de recueillir automatiquement un certain nombre d'informations publiques sur l'entreprise, dès lors que le client en renseigne le nom. Cette première étape permet d'établir un portrait-robot, enrichi dans la foulée par seulement une dizaine de questions. Le client se voit ensuite proposer trois solutions sur mesure parmi lesquelles il n'a plus qu'à choisir. Le paiement et la signature se font également en ligne et l'assurance est instantanée»
Éric Mignot précise que le client peut pour autant choisir de téléphoner à un conseiller à tout moment pour avoir un interlocuteur avec qui échanger sur ses possibilités. Ensuite ? « Les attestations sont immédiatement disponibles et le client dispose d'un coffre-fort électronique où il peut retrouver toutes ses polices d'assurance. »

Qui est rémunéré ?

Comme à chaque nouvelle innovation depuis le début de la révolution technologique, le robot-courtier ressuscite les craintes d’une machinisation globale de la profession. Pourtant, ici, tout le monde semble gagnant.
Le service opère selon le modèle classique de courtage en assurance : il prélève des commissions récurrentes sur la prime d'assurance payée par les assurés, entre 10 et 20%. De leur côté, les courtiers, banques, et mutuelles bénéficient d’une simplification des démarches et donc d’un gain de temps, qui signifie une amélioration de leur ratio de rémunération.

Un robot en perpétuelle amélioration

Le principe du «robot-courtier» de +Simple est, notamment, de s’inscrire dans une démarche d’amélioration continue.
Amélioration des parcours de souscription d’abord, grâce à la mise en place d’algorithmes de recommandations spécifiques permettant d’affiner les critères.
Automatisation du profilage client ensuite, avec près de 500 métiers couverts et 100 supplémentaires prévus dans les six prochains mois.
Couverture globale des risques enfin, le robot courtier couvrant actuellement l’activité, les locaux, le véhicule, la santé et la prévoyance du professionnel.
C'est aussi lui qui gère les polices d'assurance dans le temps. Pour ce faire, la start-up a négocié avec des assureurs afin qu'ils lui confient des délégations.
Un apprentissage qui paye, puisqu'en quelques mois le taux de concrétisation des devis a augmenté de 50% grâce notamment à la mise en place de nouveaux algorithmes.

Une équipe technique en expansion

Pour développer son robot courtier, +Simple a renforcé son équipe de développeurs et de data scientists, qui regroupe désormais près de vingt personnes.Différents partenariats technologiques ont été conclus notamment avec DataRobot, plateforme en machine learning pour accélérer ses développements de modèles prédictifs.

Et pour l’avenir ?

La start-up a fait parler d’elle cette année en organisant au mois de janvier une levée de fonds de 10 millions d’euros pour accélérer le développement de son robot-courtier. Elle en a récolté 11,8.
Ces fonds visent, d’une part, à gonfler l'accompagnement commercial des grands comptes pour accélérer la logique partenariale sur laquelle la plateforme repose, puisque pour commercialiser son offre la start-up s’appuie sur les partenariats qu’elle noue avec de gros courtiers en assurance. Voilà chose faite, la société ayant signé 8 partenariats supplémentaires à l’occasion de cette levée de fonds. Mais Éric Mignot ne semble pas près de s’arrêter : « on vise la vingtaine de partenariats d'ici la fin de l'année 2018 », précise l'entrepreneur.
Les fonds doivent permettre, d’autre part, de renforcer les équipes afin de poursuivre le développement technique et logistique de la plateforme. « Nous voulons intégrer une couche de machine learning. C'est un point sur lequel nous travaillons déjà avec Datarobot. Nous voulons également augmenter le nombre de métiers couverts et diversifier les produits d'assurance ».
Son objectif à moyen terme est que son robot apprenne à profiler les risques potentiels sur la base de l'analyse du client et plus seulement sur l'analyse des risques en tant que tels. «Quand vous assurez des locaux, on vous pose des questions sur le nombre de mètres carrés, la localisation, etc. Mais savoir que le dirigeant n'a jamais eu de problème jusque-là n'entre pas en ligne de compte. C'est dommage, le profil du chef d'entreprise a un impact sur les risques encourus. En le profilant nous ajouterons un élément non négligeable dans l'analyse de risque», clarifie Éric Mignot.
+Simple montre également la volonté de structurer son organisation en recrutant notamment un directeur financier, et en créant un service client dédié à la gestion des sinistres. Elle souhaite également préparer son développement à l’international.
Basée à Nancy et Marseille, la société compte aujourd’hui 7000 clients pour 45 salariés, et elle annonce avoir collecté plusieurs millions d'euros de primes pour le compte de ses clients.

Et pour les crédits ?

Les particuliers et les professionnels qui recherchent autre chose qu’un service d’assurance devront encore, pour le moment, se tourner vers les services des courtiers tout ce qu’il y a de plus humain.
Il est à noter que même actuellement, et alors que les taux frôlent le plancher qu’ils avaient atteint à l’automne 2016, il reste tout à fait intéressant de recourir aux services du courtier pour souscrire un emprunt.
Gain de temps non négligeable, gain de force et de pertinence dans les négociations avec la banque et la défense de son dossier, et donc gain d’argent, puisque les services de courtage en crédit sont le plus souvent gratuits. « Sur ce plan, je ne suis pas sûr que la robotisation l’emporte. Nos courtiers sont, pour nos clients, des interlocuteurs avisés et qui leur apportent un soutien complet. Non seulement un soutien technique dans leur recherche d’appartement et de financement mais, aussi et surtout, un soutien humain et moral. Je ne sais pas ce que donneraient des robots négociateurs face aux banquiers… » confie David Azoulay, Président-Directeur général d’immo9 Nantes.
Nous nous permettrons de le rejoindre sur ce point : pour renégocier un crédit existant afin de bénéficier de la baisse actuelle des taux, comment s’y prendrait un robot ?